Espaces de travail

80% des tiers-lieux pourraient fermer à cause du coronavirus

Les tiers-lieux, coworking et autres fablabs ont subi de plein fouet la crise du coronavirus et le confinement qui a stoppé net leurs activités. Beaucoup de ces espaces étaient déjà fragiles économiquement avant la crise et ils sont nombreux à n’avoir aucune possibilité d’aide comme le révèle une enquête de France Tiers-lieux. Pourtant ils participent pour beaucoup à un superbe élan de solidarité dans la lutte contre la Covid-19.

Pendant la période de confinement, France Tiers-Lieux, l’association nationale des tiers-lieux (qui porte notamment le Plan de soutien aux tiers-lieux issu de la Mission coworking du gouvernement), a lancé une enquête auprès de 1 800 tiers-lieux pour déterminer l’impact de la pandémie sur leurs activités. France Tiers-Lieux en dévoile aujourd’hui les résultats, obtenus à partir des réponses de 230 tiers-lieux issus de toute la France.

20% des tiers-lieux en danger immédiat

Comme toutes les entreprises les tiers-lieux sont touchés de plein fouet par la crise. Ils sont dans des situations économiques particulièrement difficiles, car très vite, il a été recommandé à l’ensemble des lieux de fermer pour éviter toute propagation du virus, et leurs natures hybrides – mêlant activités commerciales et activités à but non lucratif – leur offrent peu d’autonomie financière.

Les tiers-lieux se sont saisis pour la plupart des mesures mises en place par le gouvernement, mais, pour beaucoup d’entre eux, elles ne seront pas suffisantes : 80% des tiers-lieux font état d’un risque réel de fermeture à court ou moyen terme.

Parmi ces 80%, 20% se disent en danger immédiat. Et la moitié des répondants à l’enquête ont constaté des difficultés pour accéder aux banques ou la mobilisation des mesures gouvernementales. Au moment de l’enquête, 60% des tiers-lieux n’avait reçu aucune proposition de solution de leurs financeurs publics comme privés.

Coworking dans un tiers-lieu
Coworking dans un tiers-lieu.

Des espaces déjà fragiles avant la crise

Une situation financière qui s’est aggravée avec la crise du coronavirus. Avant la crise 1/3 des espaces montraient une exploitation bénéficiaire, 1/3 était à l’équilibre et 1/3 accusait un déficit.

La perte globale de chiffre d’affaires en 2020 pour les 1 800 tiers-lieux est estimée à 111,5 millions d’euros. Environ 55% d’entre eux estime la perte entre 3 000 et 2 5000 €, 30% estime la perte entre 25000 et 100 000 €, 15% estime une perte inférieure à 100 000 € et 3% estiment une perte inférieure à 1 000 000 €.

Le gros poste de dépenses de ces espaces est l’immobilier. La grande majorité des tiers-lieux est locataire, à 60% dans le privé, et à 40% dans le secteur public.

La moitié d’entre eux ont trouvé une solution pour compenser les pertes dues à la crise : 15% ont bénéficié d’une exonération et 35% d’un report de loyers.

Malheureusement, 50% des tiers-lieux n’ont pas eu la possibilité de reporter ces charges.

Changer de modèle économique pour survivre

Face à cette fragilisation de leurs modèles économiques, les espaces tentent de revoir leur fonctionnement comme le relève cet article des Echos : « Pauline Thomas (LapTop) envisage d’abandonner le coworking ouvert à tout le monde « qui n’est plus viable ». « Je pense plutôt intégrer ce service à une offre globale comprenant les formations qui existent déjà, du mentoring et l’accès à notre réseau d’experts francophones. J’imagine des coworkers engagés qui apportent leurs contributions à cette communauté», détaille la fondatrice.

Avec un espoir du côté du télétravail. A l’origine peuplés de freelances, les espaces de coworking pourraient bien profiter de l’explosion de la nouvelle demande de télétravail post-confinement. Car cette crise a démontré massivement les limites du télétravail à domicile sur de longues périodes.

Les tiers-lieux et les espaces de coworking pourraient bien devenir une alternative crédible au besoins de socialisation des salariés en télétravail et une solution de flexibilité pour les entreprises.

Les Copeaux numeriques-Fablab

L’utilité sociale des tiers-lieux

En dehors de ces aspects économiques d’espaces ressources pour les salariés et les entreprises, les tiers-lieux ont démontré leur utilité sociale avec un élan de solidarité sans précédent, dans toute la France.

Environ 9 tiers-lieux sur 10 se sont mobilisés dans des actions de solidarités : continuité pédagogique, solidarité numérique, aides aux personnes âgées, relais alimentaires… Partout, ils démontrent leur capacité à fournir des solutions concrètes, pour venir en aide à ceux qui sont en première ligne.

Le plus bel exemple de la mobilisation des tiers-lieux, ce sont les fablabs et makerspaces qui s’organisent pour prototyper et fabriquer du matériel médical d’urgence : visières, masques, respirateurs, valves, pousse-seringues… Initié en grande partie par le mouvement Maker, c’est plus largement un mouvement national de fabrication citoyenne d’urgence qui s’est mis en place, par la mobilisation unique de citoyens, d’associations, d’entrepreneurs, de makers et d’espaces ressources comme les tiers-lieux. Montrant qu’il existe d’incroyables ressources dans tous les territoires, partout en France, capables de réagir vite, de s’organiser et de faire preuve d’une grande solidarité.

Repair café à l'Ecloserie numérique
Repair café au fablab de l’Ecloserie numérique

30 000 makers actifs dans la lutte contre le coronavirus

Ce sont plus de 400 tiers-lieux et 30 000 makers, qui ont fabriqué du matériel médical en urgence pour les soignants. On dénombre 500 000 pièces, visières, masques, valves, pousse-seringues, prototype de respirateurs low-tech … fabriquées par semaine, soit depuis le début de la crise, plus de 4 millions d’unités.

Pour soutenir cet élan, France Tiers-Lieux, en association avec la Fondation de France a lancé un fonds de soutien d’urgence « Makers contre le Covid-19 » à destination de ceux qui apportent des solutions concrètes par le prototypage, la fabrication et la distribution de matériel médical.

 

Photo par Austin Distel sur Unsplash

Xavier de Mazenod

Fondateur de la société Adverbe spécialisée dans la transition numérique des entreprises et éditeur de Zevillage.

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Un commentaire

  1. Oui, la responsabilité sociale passe maintenant en premier degré. Les coworkings devront se déplacer vers des bureaux virtuels. La coopération entre les gens est très importante, surtout maintenant.

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