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Comment multiplier rapidement le nombre de tiers-lieux (4/4)

Cet article résume le travail de l’atelier du Barcamp Activity de Caen qui cherchait à identifier les leviers à actionner pour multiplier rapidement le nombre de tiers-lieux « travail » (télécentres ou espaces de coworking).

Il semble que tous les acteurs intéressés par les tiers-lieux soient obnubilés par les lieux et pas par les utilisateurs.

Cette approche « top-down » présente le risque de mettre en place des lieux vides, sans vie. De plus, cette approche laisse en milieu rural l’initiative du côté des acteurs publics, pas toujours conscients des enjeux, et donc lents à progresser.

Pour faire « exploser » rapidement le nombre de tiers-lieux en France (espaces de coworking ou télécentres), il nous paraît plus efficace d’inverser la proposition et de susciter la création de communautés d’utilisateurs.

Se focaliser sur les porteurs de projets, pas sur les lieux

C’est d’ailleurs en général ce qui se passe avec les espaces de coworking dont la gestation est plus rapide que celle des télécentres : des porteurs de projet motivés, avec un désir de travailler ensemble, préexistent au lieu.

On commence par créer de la vie dans les tiers-lieux, personne n’a envie de travailler dans un espace vide !

Espace de coworking

Selon les participants du Barcamp, la manière d’encourager un développement rapide des tiers-lieux est d’aider ces porteurs de projets dans leur démarche et de faciliter leur recherche de locaux où s’installer. Selon l’implantation, cette assistance peut être :

  • d’aider les exploitants pour leur implantation (trouver un lieu raccordé en très haut débit)
  • un apport en financement dans zones plus rurales (aménagement territorial)

Dans tous les cas, il faut prévoir un cahier des charges flexible pour suivre l’évolution de la demande des utilisateurs de tiers-lieux.

La méthode idéale proposée par les participants au Barcamp Activity pourrait être :

  • chercher les clients avant les lieux
  • créer la communauté et fixer les modalités de gouvernance (utilisateurs, gestionnaire, investisseurs)
  • définir les services et animer le communauté
  • faire grossir la communauté
  • créer le cahier des charges du lieu avec les clients
  • enfin, trouver ou créer le lieu.

Barcamp Activity : définir les besoins en milieu rural

Les acteurs publics intéressés au développement territorial peuvent faciliter le travail des porteurs de projets en mutualisant des études et en aidant à l’identification des utilisateurs.

Par exemple affiner la connaissance du type de population pour savoir qui travaille en pendulaire (enquêtes terrain pour le train et la voiture). Par exemple, la gare n’est pas forcément un lieu pertinent pour créer un tiers-lieu (cela dépend des cas). C’est toutefois un nœud de communication important entre campagne et ville.

Comme un télécentre seul est difficilement viable en milieu rural, il est nécessaire d’insister auprès des porteurs de projet sur la notion de services dans les tiers-lieux. Pour être viable, un télécentre doit être multiservcies et être aussi un EPN bénévole, une galerie photo et peinture, un lieu pour la e-administration (expérimentation « Plus de services au public »).

Télécentre multiservices
EPN bénévole au télécentre de Boitron

Insister sur la qualité du lieu qui est un facteur important du succès.

Les participants du Barcamp prévoient un droit d’usage des tiers-lieux pour les collectivités qui financent : symbole de l’engagement, renforcement du lien avec le financeur et fertilisation croisée de deux publics différents. Exemple dans la Manche qui prévoit un droit d’usage de 8 jours/an.

Et en ville ?

Le problème est plus simple en ville où la population est plus dense. Et donc l’équilibre économique plus facile à trouver qu’en milieu rural.

Modèle quartier d’affaires Amsterdam : 50% coworking et 50 % services mutualisés avec “allumage progressif” des services s’ils rencontrent du succès.

Penser à des lieux inhabituels comme les rez-de-chaussée d’immeubles : voir la collectivité et le promoteur et proposer de s’y installer avec ristourne pendant les 6 mois d’amorçage.

Voir également du côté des entreprises qui disposent de locaux.

Voir les autres compte-rendus

Voir le Barcamp Activity de Bordeaux

(Photo : Khawkins 04)

Xavier de Mazenod

Fondateur de la société Adverbe spécialisée dans la transition numérique des entreprises et éditeur de Zevillage.

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6 commentaires

  1. Malheur à l’homme seul !

    C’est plus facile en effet de trouver d’autres télétravailleurs pour t’aider dans ta démarche et pour constituer la future clientèle de ton télécentre.

    C’est un des rôles des tiers-lieux : apporter des liens sociaux professionnels aux télétravailleurs isolés.

  2. « Il semble que tous les acteurs intéressés par les tiers-lieux soient obnubilés par les lieux et pas par les utilisateurs. »

    Eh oui, Xavier, la nature a horreur du vide ! Et l’homo-interneticus a trop tendance à se concentrer sur l’avoir plutôt que sur l’être ou, mieux encore d’après moi, sur le faire. Sinon, on va nous ressortir le « savoir-être », alors qu’une fois encore il s’agit du savoir agir, savoir se comporter, savoir interagir !!

    On est au cœur du problème. Où va-t-on si les futurs coworkers pensent comme les centres d’affaires et autres récupérateurs marketing, à savoir uniquement intéressés par le lieu et son infrastructure ?

    De coworkers (en rêve !), ils deviendront de simples utilisateurs (clients) de salles prétendant être des tiers-lieux.

  3. Patrick, je me suis mal exprimé car en parlant d’acteurs je pensais surtout aux institutionnels (collectivités locales et opérateurs immobiliers).

    Justement, les coworkers échappent à la règle du « lieu d’abord ». Ils sont les seuls à penser au groupe de co-travailleurs avant de penser au lieu.

    Tout simplement parce que l’affectio sociatis, le goût et la volonté de travailler ensemble, précède la recherche d’un cadre de travail.

    Je suis bien d’accord, si on parle seulement immobilier et consommation de services cela ne fonctionne pas.

    ITG participe au prochain Barcamp ?

  4. Le recrutement initial des « clients » est effectivement une action crutiale mais très difficile dans la pratique. L’association actipole21 l’a identifée depuis sa création et a dans ce but développé un manifeste (accessible sur le site) pour recueillir l’intérêt des employeurs.
    J’ai noté clients entre guillemets pour préciser la différence qui existe entre les indépendants et les salariés publics ou privés. Ces derniers sont des usagers des tiers lieux mais n’en sont pas les clients. C’est leur entreprise (employeur) qui prend en charge les coûts du service délivré par le tiers lieu. C’est donc lui le client.
    L’employeur sera plus exigeant sur la qualité du service (confidentialité, sécurité, confort…) que ne l’est un indépendant. Il faut pour lui que l’offre existe pour qu’il puisse en évaluer l’intérêt mais surtout l’impact.

    Si créer une communauté d’indépendants peut se faire sans de trop grandes difficultés, créer une communauté d’employeurs est nettement plus ardu. Les collectivités territoriales et les chambres consulaires sont d’importants appuis pour constituer les communautés d’employeurs.

  5. Merci Xavier pour tes précisions.

    Concernant le prochain BarCamp, j’en reparle à mon collègue normand (Luc Supéra) qui pourra peut-être libérer un peu de son temps très chargé pour s’y rendre, avec d’autres autonomes « portés » avec un peu les mêmes besoins que ceux des indépendants, créateurs et autres salariés en recherche de liens et de lieux.

    Concernant Bordeaux, ça bouge, ça bouge !! Il y a des tiers lieux qui surfent sur la vague du coworking. Idem pour les centres d’affaires qui n’ont rien compris au film. Il y a un projet mystérieux à Mérignac, avec une page sur les différents réseaux sociaux, sans aucun humain déclaré.

    Comme le dit Philippe Marty, interviewé lors de la première édition de Metronum, à propos du NODE qui va voir le jour début 2012 : « ce futur espace ouvert s’intègrera dans l’écosystème existant, entre les incubateurs et les espaces de coworking « commerciaux » plus dédiés au travail indépendant. ». Voilà donc une autre forme de coworking, centré d’abord sur le recrutement de personnes qui ne seront pas des touristes, poussant la logique jusqu’au bout, avec une animation très forte du lieu et un partage « obligatoire » des pratiques collaboratives entre professionnels du numérique. C’est ce que me disait Benjamin Rosoor, jeudi soir, à Metronum.

    Benjamin est le président d’Aquinum (association des professionnels du numérique aquitain), Philippe Marty l’un de ses membres très actifs. Aquinum a été retenue comme opérateur de l’espace de coworking numérique (le NODE), mis à disposition par la Mairie de Bordeaux.

    Lire :
    http://studio.cap-sciences.net/?p=3224
    http://studio.cap-sciences.net/?p=2856
    http://www.metro-num.com
    http://www.youtube.com/user/CoworkingMerignac

  6. Meri pour ces infos et pour les liens Patrick. Tu devrais te mettre en contact avec Philippe Luttringer (plus haut dans les commentaires) qui monte un espace de coworking au Temple.

    Oui il y a ps mal de centres d’affaires qui ont du mouron à se faire s’ils ne s’adaptent pas à l’évolution des usages…

    Comme je te l’avais dit, les barcamp vont tourner « en région ». Le prochain devrait se tenir à Lille, préviens ton collègue du Nord ;-).

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