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Choses vues, entendues et pas vues à RuralTIC

Marc Duchesne, autre envoyé spécial de Zevillage à RuralTIC, nous rapporte ses observations glanées à Aurillac à propos d’aménagement numérique du territoire.

Pendant que mon camarade Alain Baritault jouait au Grand Reporter, caméra numérique dans une main et carnet de notes dans l’autre, je découvrais RuraliTIC en observateur « intêressé ».

Très haut débit, développement durable, et nouveaux usages en milieu rural: de quoi bien occuper ces deux belles journées en terre auvergnate.

Morceaux choisis…

Sur les nouveaux usages, ceci, entendu pendant la Table-ronde « Télé-Médecine »:

Albert Claude Benhamou, professeur de médecine, chirurgien, et expert TIC, en aparté, avant l’ouverture de la conférence :

« On n’a pas besoin du Très Haut Débit pour faire de la Télé-Médecine dès maintenant. C’est une question de structures et de méthodes. »

Effectivement, veillons à ne pas mettre la charrue avant les boeufs…

Anne-Marie Comparini, consultante Datacet et ancienne élue:

« Dans la population française des plus de 80 ans, seuls 10% sont « connectés, alors que en Suède la proportion est de 80%. »

Ne serait-ce pas là la véritable fracture numérique ?…

Thierry Zylbergberg, Vice-Président Orange Santé:

« Il faut crever la baudruche qui dit que ‘la technologie déshumanise’. Au contraire, la technologie aide à restaurer le lien social ».

Entendu systématiquement dans toutes mes conversations avec des maires et des présidents de communautés de communes de la France d’en Bas: « le Très Haut Débit nous aiderait à restaurer le lien social »…

« Une étude réalisée dans 5 pays dont la France, l’Espagne et l’Italie, montre que la population est majoritairement favorable aux services de télé-santé. En France, les personnes les plus réticentes sont les acteurs du monde médical. »

D’où l’échec jusqu’à présent de quasiment toutes les expérimentations de télé-médecine, par exemple en Champagne-Ardenne. Peut-être faudrait impliquer le monde médical dès la conception des solutions ?…

« On n’a vraiment pas besoin de la fibre optique pour le suivi médical des personnes âgées à domicile. Juste quelques points de mesure périodiques… ».

Bis repetitae. La fibre optique ne sauvera jamais une jambe. Des procédures et méthodes fiables et faciles à mettre en oeuvre, si.

« Ce qui est indispensable, c’est accompagner les gens dans le changement. »

On assiste à un changement de comportement radical des industriels et opérateurs: ils ont compris que leurs produits, pour être adoptés par le plus grand nombre, doivent être conçus avec le plus grand nombre.

« Les collectivités locales doivent penser dépenses de fonctionnement pour l’accompagnement et le déploiement des nouveaux services auprès des citoyens, et pas seulement investissement dans les technologies »

Les usages avant la technique, enfin !

Dr. Philippe Thieblot, président du Conseil régional d’Auvergne de l’Ordre des médecins:

« Si les médecins sont réticents à la télé-médecine, c’est uniquement parce qu’ils ne sont pas rémunérés. Le problème est la rémunération du temps passé ».

Impliquer les médecins dès la conception des solutions de télé-médecine, sinon cela ne marchera jamais.

Sur le développement durable, vu et entendu pendant l’Atelier « Impact des TIC sur le développement durable »:

Conçu et piloté par l’efficace Gilles Berhault, président d’ACIDD, cet atelier promettait beaucoup sur le papier. La salle était comble, de nombreux participants se pressant jusque dans le couloir.

Après son habituel rapide et percutant tour d’horizon de la problématique « développement durable », Gilles passait la parole au « témoin » du jour », à savoir Hughes Aubin, chargé de mission TIC à Rennes Métropole. Qui ne quittait plus le micro, se lançant dans un exposé certes brillant mais totalement hors sujet sur les nouveaux outils type Web 2.0, l’Open Source, et tout ce genre de choses que les geeks et early adopters adorent, mais que l’élu local abhorre…

Un atelier à sens unique – un comble lorsque l’on parle « Web 2.0 » – qui a, au vu des nombreux regards interrogatifs et au su des murmures « agacés », n’a pas atteint l’objectif affiché dans le programme : Web 2.0 et développement durable, le lien est difficile à faire pour la très grande majorité des élus de nos campagnes…

Sur le Très Haut Débit, choses pas vues, chose entendue

A part les interventions des sénateurs et députés, et du ministre Michel Mercier – voir le compte-rendu d’Alain, le Très Haut Débit semblait bien loin des préoccupations immédiates de la plupart: les zones blanches ADSL étaient souvent évoquées dans les conversations et les questions des élus locaux…

Toutefois, un élément revenait très souvent : la mise à disposition de tous des données sur les infrastructures du territoire, sur le modèle de l’initiative DataSF récemment lancée par Gavin Newsom, Maire de San Francisco.

L’idée générale étant que la collectivité locale doit pouvoir :

  • disposer de toutes les informations relatives aux réseaux télécoms existants sur son territoire, pour
  • mieux mettre en place, à moindres coûts, son propre réseau type RIP Réseau d’Initiative Publique.

Quel maire de France osera rejoindre San Francisco dans la démarche ?…

Xavier de Mazenod

Fondateur de la société Adverbe spécialisée dans la transition numérique des entreprises et éditeur de Zevillage.

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6 commentaires

  1. @Olivier : merci de vos commentaires.

    1) Sur la Télé-Médecine: je vous invite justement à lire la contribution d’un internaute français résidant aux USA sur ce post de l’ami Jean-Michel Billaut, où il est question de la société de services Kaiser Permanente.
    Ce qui rejoint ce que disent tous les acteurs de la Santé: on n’a pas besoin AUJOURD’HUI du Très Haut Débit pour faire de la Télé-Santé, on a juste besoin de mieux articuler les différents outils, processes, et méthodes à notre disposition.
    Les techniques et les lois sont là, il suffirait de mieux les mettre en oeuvre.

    D’autant que, lorsque on parle Télé-Santé, on parle de l’ensemble de la population. Vouloir à tout prix développer la Télé-Médecine sur Très Haut Débit, c’est exclure de-facto la majorité de la population française…
    Il vaut mieux fournir dès aujourd’hui des services e-Santé à l’ensemble de la population, sur les réseaux d’accès les plus répandus EN ZONES RURALES: le 56kbps, tout en développant, à petite échelle, des services « innovants » sur THD là où il y en a et surtout, où il est possible de tester en grandeur réelle (mauvaise nouvelle: il n’y a qu’un seul endroit en France où l’on peut expérimenter des services à la personne sur THD sans passer par un opérateur télécom commercial, bonne nouvelle: il s’agit de Pau, Pyrénées Atlantiques).

    2) Sur les données « infrastructures réseaux »: je vous invite à relire ce communiqué de l’Avicca, puis de discuter ensuite avec les responsables « Télécoms » dans les collectivités locales. Vous comprendrez alors que la mise en garde de l’Avicca est justifiée : à ce jour, l’obtention de ces informations est TRES difficile, pour des raisons principalement de volonté de blocage de la part de l’opérateur historique.

    Derrière cette première étape, vient la question de la mise à disposition du public des données relatives à la collectivité, par nature appartenant aux citoyens mêmes. C’est ce qu’a osé faire Gavin Newsom, le jeune maire « 2.0 » de San Francisco.

  2. Bonjour,

    J’ai réagis rapidement à votre post car je lis de plus en plus souvent des critiques (je raccourcis) sur le déploiement du FTTH en l’opposant systématiquement aux services et aux usages.

    Je trouve dommage cette critique alors que l’État – comme vous avez pu le constater lors du Ruralitic à l’occasion du discours de M. Mercier – a une réflexion importante en ce moment sur les conditions du financement de son déploiement (ex : http://www.strategie.gouv.fr/article.php3?id_article=1033) et alors que régulièrement les collectivités critiquent l’action (ou la non-action) de l’État sur cette question de l’aménagement numérique.

    Sur la connaissance des infrastructures et réseaux, effectivement le cadre réglementaire n’est pas encore complétement fixé (ce qui explique le refus de FT pour le moment) -> les différents acteurs publics ne peuvent pas encore obtenir ces informations. Néanmoins la loi de modernisation de l’économie est claire, elle oblige les opérateurs à cette communication.

  3. Je rejoins Olivier sur l’opposition trop souvent faite entre infras, services et usages. Les 3 sont à développer en // et les 3 s’adaptent aux autres…
    Nous encourageons l’utilisation de la messagerie sécurisée par tous les médecins, l’intérêt est évident : Compte-rendus de labo, de radiologie, etc. Mais si les pôles de santé pouvaient être reliés en THD, nous pourrions échanger les dossiers médicaux avec l’imagerie médicale. Donc certes, il ne faut pas attendre le THD partout pour rendre des services à la personne, en santé ou ailleurs mais en même temps il ne sert à rien d’attendre l’effectivité de services pour développer le THD. D’autant, et je crois savoir que RuralItic l’a rappelé, on ne va pas basculer d’un coup un territoire en TDH, ce sera un processus long, de monté en débit, par capillarité progressive des équipements réseaux (pas sûr que je sois clair avec ce jargon… ;-))

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