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Pourquoi les télétravailleurs ont besoin de Très haut débit

Il y a quelque temps, dans une discussion sur l’accueil de télétravailleurs et sur leurs besoins en connexions Internet, un responsable de CCI du Sud de la France me dit avec beaucoup de certitude arrogante :  » Les entreprises de notre département disposent toutes au minimum de connexion ADSL à 1 méga et ce qui est suffisant pour travailler » !

Ce n’est pas la première fois que je rencontre des responsables économiques ou des élus qui pensent la même chose. Or, cette méconnaissance des besoins de leurs ressortissants, ou de leurs électeurs, nuit gravement à la santé de leur tissu économique.

Aujourd’hui ce n’est plus de débits asymétriques poussifs dont nous avons besoin mais de très hauts débits symétriques. Nous faisons avec nos mauvaises connexions car nous n’avons pas le choix. Mais nous perdons en productivité et en qualité de vie comme l’expliquent nos amis de Netploy.

C’est un comble : tout le monde comprend que pour nos usages de loisirs ou ceux de nos enfants (téléchargement de vidéos, échanges de photos, jeux en ligne, vidéo à la demande…) nous avons besoin de débits de plus en plus élevés. D’ailleurs, à chaque fois que les débits augmentent, nous inventons les usages qui vont avec.

Mais quand il s’agit de survie d’entreprises, de compétitivité, de développement rural, nous avons qu’à nous débrouiller avec ce que nous avons. Sauf rares exceptions, les élus se contentent de suivisme et d’affichage médiatique. En gros, ils n’ont pas compris que le Très haut débit était indispensable aujourd’hui, pas dans 10 ou 20 ans. Malheureusement, il faudra attendre encore un peu pour trouver des élus 2.0.

Pourquoi ces débits élevés sont-ils vitaux, principalement dans la France rurale qui doit attirer de l’activité économique pour vivre ?

Parce les usages, les organisations du travail, les outils changent vite :

  • nos outils subissent une « webisation » ; nos anciens logiciels migrent sur le Web et exigent de plus en plus de débit, symétrique car nous travaillons sur le Web en temps réel ;
  • cette évolution implique que nous sommes en permanence connectés et donc gourmands en trafic ;
  • nos activités impliquent de communiquer plus et plus vite et donc de publier en ligne, et de partager des fichiers lourds ou des écrans à distance.

Ne parlons même pas de toutes les applications « métiers » qui exigent du débit : CAO, imprimerie, « vraie » vidéoconférence, vidéosurveillance ou de connexions sécurisées d’entreprise via un VPN

Au passage, la fibre optique règlerait le problème des zones blanches inaccessibles à la TNT puisqu’elle donnerait accès à toutes les TV numériques du monde !

Fibre optique ou NRA-ZO ?

La méconnaissance des enjeux n’est pas la seule responsable de la situation. Certains élus baissent les bras car ils pensent que la fibre est trop chère pour leur collectivité. Et ils se tournent donc vers des solutions qu’ils pensent meilleures parce que moins chères.

Et comme le lobbying de France Telecom auprès des élus locaux est puissant et efficace (souvenez-vous du piège à gogos baptisé Départements innovants), les collectivités locales se font refiler des NRA-ZO (pour Zone d’ombre), solution miracle pour « gonfler » les Noeuds de raccordement (NRA) et étendre le rayon d’action de l’Adsl.

Cette solution est chère (50 à 80 000 € par NRA équipé). A titre d’exemple, le département de la Mayenne a équipé 55 NRA de France Telecom pour 4,5 M€.

On constatera que c’est surtout France Telecom qui retire un bénéfice de ces investissements réalisés par les collectivités locales : l’argent public finance une technologie en fin de course qui assure à l’opérateur historique la prorogation de son monopole de fait (le dégroupage est plus difficile voire impossible sur ces NRA). Bien joué, les investissements en fibres seront retardés de 20 ans.

Sérieusement, les élus ou les responsables consulaires pensent-ils répondre à nos besoins de débit avec des offres satellites ou d’Adsl rural ? Certains oui, d’autres ne sont que cyniques.

Depuis 50 ans, on a consciencieusement tué les paysans français, pivots de l’activité économique rurale. Mais, nous télétravailleurs, disposons d’un gros avantage sur les exploitants agricoles : nous pouvons voter avec nos pieds.

Xavier de Mazenod

Fondateur de la société Adverbe spécialisée dans la transition numérique des entreprises et éditeur de Zevillage.

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5 commentaires

  1. En plus, l’ARCEP avec « la main sur le cœur », écrit dans son dernier fascicule du CRIP , que la « montée en débit » sur la boucle locale cuivre, ne doit pas être l’occasion de financer la « modernisation du réseau de l’opérateur historique » par de l’argent public …
    Belle ambigüité !

  2. Sur le NRA ZO,l’ami Michel Lebon a une argumentation « top »en 3 « couches » ! A défaut d’avoir compris toutes les « paroles » je crois avoir compris la « musique » !
    Il vient d’ouvrir un blog visité par NKM et Hervé Novelli (c’est Michel qui le dit!) à l’adresse http://mlebon.typepad.com/hd_rural/2009/10/nrazo-expliqu%C3%A9-en-3-couches-.html#comments

    Et puisqu’on est dans la ruralité restons y ! Je viens d’écrire au président de l’ANEM (http://www.anem.org/)dont c’est le congrès demain et après demain le courriel ci-dessous. J’ai mis en copie mes parlementaires locaux membres de cette association + l’Avicca et le directeur de cabinet de Michel Mercier

    Monsieur le président,

    La couverture numérique des territoires de montagne est au programme du congrès de l’ANEM dont vous etes le président

    En tant que responsable d’une association de promotion du (trés) haut débit dans les territoires ruraux je m’en réjouis et me permets quelques « réflexions » :

    On parle beaucoup de TNT ces derniers temps, ce qui est naturel, mais il ne faudrait pas que le « sujet TNT », très « médiatique », n’occulte la vraie fracture numérique de demain (celle entre l’Adsl et le très haut débit) dont la quasi totalité des Français ne sont pas, selon nous, véritablement conscients.

    Le « combat » de notre association prend une acuité particulière à la veille du débat sur la fracture numérique à l’assemblée nationale.. Dés que nous avons eu connaissance de l’existence de la proposition de loi j’ai écrit à tous les sénateurs et, plus tard, après le vote du sénat, aux membres de la commission des affaires économiques de l’assemblée

    Tout récemment j’ai posté sur le blog des Webs du Gévaudan un article qui, en quelques jours (l’article est du 17 octobre) parait avoir eu un petit succès d’estime …dans le droit fil du dernier communiqué de l’ Avicca( http://www.avicca.org/Tres-haut-debit-pour-tous-tous.html ), de mes « interventions » ICI et LA et d’un « papier » du Monde sur le « département symbole de la ruralité » !

    Toutes ces interventions ont comme « fil directeur » d’inscrire les solutions de prise en compte des besoins haut débit d’aujourd’hui dans une démarche de maillage du territoire en fibre optique au plus près de l’abonné dont l’objectif doit être, selon nous, d’amener dans nos campagnes, à défaut de vrai FTTH (Fiber To The Home) tout de suite, du « FTTH rural » (Fiber To The Hameau) !

    J’espère que vous ne prendrez pas ombrage de cette « intrusion » dans un emploi du temps que je devine très chargé et souhaite une pleine réussite à vos deux journées de travail pour une ruralité moderne, alliance du terroir et de l’Internet !

    Pierre Ygrié
    Webs du Gévaudan

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