Télétravail

Résistance au télétravail : c’est quoi ce binz ?

On ferme les fleuristes et les librairies pour limiter la progression de la pandémie et dans le même temps les entreprises ne jouent pas le jeu du télétravail. Pourtant, les clusters les plus nombreux se trouvent en entreprise. Mais qu’est-ce que c’est que ces blocages criminels vis-à-vis du télétravail ?

Papy fait de la résistance

Assez récemment, le dirigeant-fondateur d’une entreprise du CAC 40, âgé de plus de 80 ans, affirmait en interne que, lui vivant, il n’y aurait jamais de télétravail dans son entreprise. Depuis, l’entreprise a fini par ouvrir timidement le télétravail à ses salariés.

Il faut reconnaître que cette position est révélatrice d’un état d’esprit, d’une conception du travail et du management. Très largement partagée comme on l’a vu lors du 1er déconfinement avec les injonctions à revenir au bureau. Ou, plus grave pendant le 2e confinement, avec le nombre d’entreprises ne suivant pas les consignes du gouvernement de favoriser le télétravail. Déjà, en octobre, avant le reconfinement, le constat était clair :

Les salariés sont peu à télétravailler. Pas parce qu’ils ne le veulent pas comme voudrait le faire croire ce sondage mais parce qu’on ne les y autorise pas. Pourtant, certains scientifiques avaient déjà alerté sur l’erreur de l’abandon du télétravail.

Résultat relevé par France Info : plus de monde au bureau, plus de monde dans les transports aux heures de pointe que lors du premier confinement et plus de voyageurs contraints de prendre les transports. Le « monde d’avant » se défend.

Or, le gros problème c’est que les clusters les plus importants (hors Ephad et milieu familial restreint) se situent… dans l’entreprise comme le montre cette infographie de Santé publique France citée par Bertrand Duperrin.

Clusters d'entreprise

Mise en danger de la vie d’autrui

Evidemment, cette inertie des entreprises agace le gouvernement qui menace les récalcitrants de sanctions s’ils n’obtempèrent pas et ne contribuent pas à freiner la propagation de la Covid-19. L’inspection du travail est même mobilisée ! Incroyable que la ministre doive aller en inspection dans des tours de la Défense pour faire la leçon aux entreprises car elle n’a aucun moyen légal pour imposer le télétravail.

Comment ces chefs d’entreprises ne réalisent pas qu’ils mettent en danger leurs salariés en leur refusant le télétravail puisque le bureau est un lieu avéré de contamination ?

On pourrait penser que les syndicats, dont la mission historique première est d’assurer la santé et la sécurité des salariés sur leur lieu de travail seraient plus prompts à dégainer le « droit de retrait » ou à lancer des actions en justice pour mise en danger de la vie d’autrui. Mais on les voit assez timides sur le sujet.

«  Alors oui, certains RH ont été et sont de quasi-criminels par inaction comment Bertrand Duperrin dans l’article cité plus haut. Mais qui se retournera contre eux ? Un salarié malade ? Seul il ne pèsera rien. Un syndicat ? Ils sont complices car ils ne voulaient pas du télétravail. Le gouvernement ? C’est lui qui par inaction leur a refilé la patate chaude.

Entre le manque de courage des uns et l’hypocrisie quasi criminelle de certains autres on ne peut pas défendre l’indéfendable : dans beaucoup trop de cas la santé des salariés a été la cinquième roue du carrosse. A tel point qu’on en oubliera ceux qui ont vraiment fait le job et tout fait pour éviter d’exposer leurs salariés d’être exposés à un risque qu’on pouvait éviter.

Le pire c’est qu’on ne les a même pas sacrifiés sur l’autel de l’économie mais simplement au nom d’une conception aujourd’hui obsolète de l’entreprise, du travail et des rapports managériaux. »

Le télétravail, cause de tous les maux

Curieusement, le télétravail bashing a repris, comme pour accompagner la position du Medef, des entreprises réticentes et des syndicats : revenir et rester au bureau pour sauver l’économie. Et l’on refait semblant de confondre télétravail et confinement.

Le télétravail, on le sait, c’est bien connu des télétravailleurs, «  c’est totalitaire » mais il vaut apparemment mieux le réaffirmer. Sans voir que ces mauvais comportements ne sont pas causés par le télétravail mais par un mauvais management.

Le télétravail isole, un classique qu’il ne faudrait pas oublier ! Mais, plus original, il rend aussi sourd. Sans compter qu’il nous expose aux addictions de tabac, d’alcool et… de drogue. Rien que ça !

Mais l’accusation la plus récente est quand même l’accusation d’être un grand fauteur de burn-out, comme si les salariés fragiles ne l’étaient pas non plus au bureau. Certes, le confinement combiné avec 100% de télétravail a pu engendrer de l’épuisement et des burn-out sans toutefois être une généralité. Curieusement, ces accusations proviennent souvent de consultants ou de coach en qualité de vie au travail…

Pendant les épidémies on pourrait penser que toute la population est solidaire et unie pour enrayer le fléau côte à côte. Mais non. Souvenez-vous de la Peste de 1720 à Marseille. A l’époque, déjà, la cupidité, la bêtise et la légèreté face à la pandémie avaient causé la mort de la moitié des Marseillais.

Photo de Tina Witherspoon sur Unsplash

Xavier de Mazenod

Fondateur de la société Adverbe spécialisée dans la transition numérique des entreprises et éditeur de Zevillage.

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