Si je filais une métaphore cinématographique pour qualifier le débat autour de la proposition de loi sur le télétravail, j’hésiterais entre Beaucoup de bruit pour rien et Tout ça pour ça.

Comme je l’ai souligné plusieurs fois ici, le texte en cours de débat à l’Assemblée jusqu’à ce soir n’est pas révolutionnaire. Le télétravail n’est d’ailleurs qu’un volet de la proposition de loi.

Ses apports sont minuscules par rapport à l’accord interprofessionnel de 2005. Et, heureusement, la proposition de loi a évolué (voir notre tribune de décembre dernier) : elle était partie pour être une usine à gaz inutile.

Le bon côté de ce texte c’est qu’il rappelle quelques principes qui seront inscrits dans le code du travail : principe du volontariat chez les salariés pour passer en télétravail et obligations de l’employeur. Si les amendements sont votés, il devrait aussi ouvrir des déductions fiscales aux entreprises qui offrent le télétravail à leurs salariés.

Enfin, cette proposition de loi marque, plutôt symboliquement, un intérêt de la part du gouvernement pour le sujet.

Le mauvais côté du texte c’est qu’il lance un débat public négatif et politise le thème du télétravail. Le groupe communiste veut par exemple supprimer tous les articles « télétravail » du texte et les syndicats s’enflamment.

Il faut dire que l’amendement sur le télétravail pendant le congé maternité ou maladie proposé par Frédéric Lefebvre (et rejeté) était assez malhabile. Même si, sur le fond, il n’est pas scandaleux qu’un salarié immobilisé chez lui (grossesse ou maladie) puisse, s’il le souhaite, travailler depuis son domicile dans certains cas.

Cet amendement a donné un prétexte à tous les opposants au télétravail pour relever le nez. On vous l’avait bien dit, le télétravail est inhumain, il brise le lien social et impose des cadences infernales aux pauvres malades alités !

Exploitation politique, inquiétudes sincères ou mauvaise foi ? Un peu tout à la fois. Comme l’explique Nicole Turbé-Suetens, le texte réveille les vieux démons de la loi sur le travail à domicile. Et dire qu’on avait mis 10 ans à se débarrasser de ces idées reçues sur le télétravail !

Pour en savoir plus : voir le rapport à la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales à télécharger, en PDF.